Fernand Léger (1881-1955)

Los 322
20.10.2023 17:00UTC +01:00
Classic
Startpreis
€ 900 000
AuctioneerCHRISTIE'S
VeranstaltungsortFrankreich, Paris
Archiv
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Archive
ID 1053082
Los 322 | Fernand Léger (1881-1955)
Schätzwert
€ 900 000 – 1 200 000
Fernand Léger (1881-1955)

Nature morte (1er état)

signé et daté ‘F.LÉGER 24’ (en bas à droite); signé, daté et inscrit ‘NATURE . MORTE . 1er ETAT 24 F.LEGER’ (au revers)

huile sur toile

50.2 x 64.8 cm.

Peint en 1924



signed and dated ‘F.LÉGER 24’ (lower right); signed, dated and inscribed ‘NATURE . MORTE . 1er ETAT 24 F.LEGER’ (on the reverse)

oil on canvas

19 ¾ x 25 ½ in.

Painted in 1924





Provenance

Galerie l'Effort Moderne (Léonce Rosenberg), Paris (inv. no. 8277; acquis auprès de l'artiste le 17 novembre 1924).

Vente, Me Walther, Paris, 23 décembre 1927, lot 99.

Vente, Mes Ader et Pacitti, Paris, 14 décembre 1960, lot 265 (titré 'La Table').

Collection particulière, Suisse (probablement acquis au cours de cette vente).

Puis par descendance au propriétaire actuel.



Literature

G. Bauquier, Fernand Léger, Catalogue Raisonné de l'Œuvre Peint, 1920-1924, Paris, 1992, vol. II,, p. 300 et 345, no. 372, (illustré en couleurs, p. 301).

C. Derouet, Correspondances, Fernand Léger, Léonce Rosenberg, 1917-1937, Paris, 1996, p. 275, no. 8378.



Exhibited

Tokyo, The Bunkamura Museum of Art; Kagawa, Marugame Genichiro Inokuma Museum of Contemporary Art; Nagoya, Aichi Prefectural Museum of Art et Ibaraki, The Museum of Modern Art, Fernand Léger, avril-novembre 1994, p. 121, no. 25 (illustré en couleurs).

Paris, Centre Georges Pompidou; Madrid, Museo Nacional Centro de Arte Reina Sofía et New York, Museum of Modern Art, Fernand Léger, mai 1997-mai 1998, p. 134 (illustré en couleurs).

Grenoble, Musée du Grenoble, L'Esprit nouveau, Le purisme à Paris, 1918-1925, octobre 2001-janvier 2002, p. 236, no. 51 (illustré en couleurs, p. 150).



Further details

« L’homme moderne vit de plus en plus dans un ordre géométrique prépondérant, affirmait Fernand Léger. Toute création mécanique et industrielle humaine est dépendante de volontés géométriques. […] J'aurai donc à causer d'un ordre architectural nouveau : l'architecture de la mécanique. Toute l'architecture ancienne et moderne procède, elle aussi, de volontés géométriques » (in E.F. Fry, éd., Fernand Léger, Functions of Painting, New York, 1973, p. 52 et 53).

Une vague néoclassique déferle sur les arts après la Première Guerre mondiale : de tous les adeptes de cette esthétique nouvelle, Léger est peut-être le peintre qui en signe l'interprétation la plus moderniste. Jonglant avec un large éventail de motifs, ses compositions d'entre-deux-guerres atteignent, malgré leur densité, une harmonie et un équilibre plastique remarquables. En vedette : les objets du quotidien, que l'artiste se plaît à juxtaposer de manière très soignée, très calculée, créant entre eux des contrastes tout à fait percutants. En découlent des œuvres aux accents stoïques, qui attestent toute la fascination de Léger pour la beauté des produits manufacturés, du moteur d'avion le plus à la pointe au plus prosaïque des ustensiles ménagers.
Au début des années 1920, Léger répond en plusieurs temps au « rappel à l'ordre » émis par certaines branches des avant-gardes parisiennes après la Grande Guerre. Il se détourne alors du style mécanisé et frénétique de ses premiers tableaux, au profit d'une atmosphère classicisante, plus dépouillée, plus mesurée, dont témoigne la présente Nature morte. Si la rencontre de formes hétérogènes reste la moelle épinière de son art, l'intention n'est plus la même : désormais, la création d'un ordre et d'une harmonie d'ensemble l'emporte sur l'expression de la dissonance et de la vitesse des temps modernes. Dans un article paru en 1924 dans le Bulletin de l’Effort Moderne, revue dirigée par Léonce Rosenberg (son mécène d'alors), Léger défend ouvertement « une société sans frénésie, calme, ordonnée, sachant vivre naturellement dans le beau sans exclamation ni romantisme, tout naturellement. Nous allons là, tout simplement. C'est une religion comme une autre. Je la trouve utile et belle » (cité in ibid., p. 47).
Ce discours résonne avec la pensée que prône alors le mouvement puriste, fondé par Amédée Ozenfant et Le Corbusier. Leurs théories suscitent grandement l'intérêt de Léger : notamment l'idée qu'une certaine rigueur devrait sous-tendre toute création artistique. C'est dans cette optique de « retour à l'orde » qu'il se tourne vers les valeurs humanistes et académiques dont s'était nourri l'art des siècles passés. Déterminé à révolutionner cet héritage artistique, Léger se réapproprie les très traditionnels genres de la nature morte, du paysage ou du nu pour mieux conjuguer la noblesse intemporelle du classicisme avec des sujets propres à la vie moderne. En filigrane, il cherche par-dessus tout à élaborer et promouvoir une expression plastique profondément universelle, en accord avec les avancées radicales et le rythme effréné d'un monde en pleine mutation.
Au lendemain de la Grande Guerre, l'image mouvante du grand écran conquit un public de plus en plus large. Ayant déjà fait quelques incursions dans le cinéma d'avant-garde avec son ami poète Blaise Cendrars (qui le présente notamment à Abel Gance en 1921), Léger se lance en 1924 dans la conception d'un film à quatre mains avec le réalisateur américain Dudley Murphy. Imaginé, à l'origine, pour accompagner l'œuvre éponyme du compositeur George Antheil, Le Ballet mécanique présente une succession d'images répétitives, sans scénario, dominées par des objets courants. Cette parenthèse cinématographique aura un impact décisif sur la démarche plastique de Léger. « Contraster les objets, des passages lents et rapides, des repos, des intensités, tout le film est construit là-dessus, écrit-il. Le gros plan, qui est la seule invention cinématographique, je l'ai utilisé. Le fragment d'objet lui aussi m'a servi ; en l'isolant on le personnalise. Tout ce travail m'a conduit à considérer l'événement d'objectivité comme une valeur très actuelle et nouvelle. Nous vivons l'avènement de l'objet qui s'impose dans ces boutiques qui ornent les rues » (extrait d'un article non publié, ‘Ballet mécanique’, circa 1924, in Functions of Painting, p. 50).
Pour souligner leur prédominance, Léger dote ses objets manufacturés d'une formidable monumentalité. Pièces de machines et autres éléments mécaniques, souvent inspirés des inventions du boum industriel de 1914-18, font ainsi leur entrée dans le champ de la peinture moderne. Dans Nature morte, ces artefacts rendus de manière très simplifiée sont placés dans un décor aux accents De Stijl, découpé en aplats rectangulaires qui se jouxtent et se chevauchent. Quelques moulures disposées à l'horizontale et à la verticale forment des cadres à l'intérieur du cadre, et séparent ainsi les différents éléments autant qu'elles les relient. Quant aux objets, Léger les a soigneusement agencés de façon à leur accorder le même degré d'importance ; comme s'ils apparaissaient en gros plan sur grand écran, ils revêtent tous une forte présence visuelle.
Ces natures mortes conçues au milieu des années 1920 marquent le point culminant du classicisme de Léger. En quelques années seulement, l'artiste aura vu naître sur ses toiles toute une gamme d'objets improbables, porteurs de contrastes inédits et unis par la volonté de créer un équilibre absolu, presque parfait, que l'on ne retrouve que très rarement dans ses œuvres ultérieures. Christopher Green salue les prouesses de cette période : « [Les natures mortes] réunissent toutes les qualités de ses précédentes œuvres mécanisées : la composition minutieuse, la précision extrême de la facture, les formes nettes et harmonisées, l'alternance entre variation et répétition, l'équilibre de forces contraires ; or elles y parviennent avec une économie de moyens et une maîtrise des paradoxes de la perspective bien supérieures à son travail antérieur. […] C'est alors que l'objet courant acquiert une vraie monumentalité » (Léger and Purist Paris, cat. exp., The Tate Gallery, 1970, p. 77, 79 et 80).

"Modern man lives more and more in a preponderantly geometric order, Léger declared. All mechanical and industrial human creation is subject to geometric forces...I would, then, bring about a new architectural order: the architecture of the mechanical. Architecture, both traditional and modern, originates from geometric forces." (E.F. Fry, ed., Fernand Léger, Functions of Painting, New York, 1973, p. 52-53).
In the early 1920s, Léger responded by stages to the rappel à l'ordre, the ‘call to order’ that had been embraced by the Paris avant-garde during the post-war period. Léger turned away from the dynamic mechanical manner of his earlier work, and began to imbue his paintings with a calmer, more balanced, and deliberately calibrated classical demeanour – as exemplified by the present work. He remained steadfast to his basic principle of seeking out and exploiting contrasts in forms, but he now pursued these ideas toward a different end, in which the creation of an overriding harmony and order supplanted the wilful and passing effects of dissonance. In a 1924 article he published in his dealer of the time, Léonce Rosenberg’s periodical, the Bulletin de l’Effort Moderne, Léger advocated for ‘…a society without frenzy, calm, ordered, knowing how to live naturally within the Beautiful without exclamation or romanticism. That is where we are going, very simply. It is a religion like any other. I think it is useful and beautiful,’ (quoted in ibid., p. 47).These ideas were shared at this time particularly by the Purist leaders, Le Corbusier and Amédée Ozenfant. Léger had been attracted to their theories on Purism, in particular the ideal of order that they held as central to all artistic creation. To this end he looked toward the classical, humanistic ideals that informed the art of the past. He was keen on making his own momentous statement, in which he would unite the timeless order of Classicism with subjects taken from everyday modern life, presented in the conventional and respected genres of still-life, landscape and figure painting. Léger sought to create and promulgate an art that was authentically contemporary and cosmopolitan in every respect, keeping pace with the drastic changes that were transforming the modern world at an unprecedented, ever accelerating pace.
In the years that followed the war the moving image of the film gained mass-appeal. Léger had done work in avant-garde cinema with his friend the poet Blaise Cendrars, who introduced him in 1921 to the famed director Abel Gance. In 1924 Léger collaborated with Dudley Murphy, an American cameraman and film-maker, to produce the film accompaniment to composer George Antheil's Le Ballet mécanique. The moving images concentrated on objects, without a scenario. This experience was instrumental to the new approach he took in his painting. Léger wrote, ‘Contrasting objects, slow and rapid passages, rest and intensity--the whole film was constructed on that. I used the close-up, which is the only cinematic invention. Fragments of objects were also useful; by isolating a thing you give it personality. All this led me to consider the event of objectivity as a very new contemporary value. We are living through the advent of the object that is thrust on us in all those shops that decorate the streets,’ (from an unpublished article, ‘Ballet mécanique,’ circa 1924, in Functions of Painting, p. 50).
To underscore the autonomous existence of the objects in his paintings, Léger has endowed these quotidian objects and forms with magnificent monumentality. He brought machine-like elements, often derived from the latest wartime techno-industrial developments, into the realm of modernist painting. In Nature morte, the objects, rendered in a simplified manner, are placed in a flattened De Stijl-like space, organised in abutting or overlapping rectangular sections. Various horizontal and vertical wall mouldings, creating screen frames within frames, both separate and connect the objects, which through their specific placement each possess equal pictorial weight and significance, as if seen in a cinematic close-up.
Nature morte and other still-lifes of the mid-1920s represent the culminating stage in Léger’s Classicism, a phase that would yield within a few years to new kinds of objects generating new contrasts and which aimed to create a state of virtually absolute equipoise that he rarely pursued in later works. As Christopher Green has summed up the artist’s impressive achievement of this period: ‘[The still-life paintings] bring together all the qualities of his earlier mechanical works; the careful planning, the perfect precision of technique, the clear, standardized pictorial forms, the interest in both variations and repetition, the sense of balance between opposing forces; but they do so with an uncluttered simplicity and a controlled mastery of spatial paradox beyond the range of his earlier work... It was now that the common object acquired true monumentality,’ (Léger and Purist Paris, exh. cat., The Tate Gallery, 1970, p. 77, 79-80).
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