Jane Graverol (1905-1984)

Lot 44
24.09.2024 10:00UTC +00:00
Classic
Sold
€ 44 100
AuctioneerCHRISTIE'S
Event locationUnited Kingdom, London
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ID 1302162
Lot 44 | Jane Graverol (1905-1984)
Estimate value
€ 30 000 – 50 000
Jane Graverol (1905-1984)
Fleurs
signé 'JANE GRAVEROL' (au revers)
huile sur toile
65 x 49.4 cm.
Peint vers 1960

signed 'JANE GRAVEROL' (on the reverse)
oil on canvas
25 5/8 x 19 ½ in.
Painted circa 1960




Provenance

Galerie Isy Brachot, Bruxelles et Paris.
Acquis auprès de celle-ci le 6 juin 1986.



Exhibited

Paris, Galerie Isy Brachot, Le Surréalisme en Belgique I, Peintures, dessins, collages, objets, avril-juillet 1986, no. 39 (illustré à l'envers).
Aix-en-Provence, Galerie d'Art du Conseil Général des Bouches-du-Rhône, "Ça c'est le bouquet !", janvier-avril 2001 (illustré en couleurs).
Montauban, Musée Ingres, Vous avez dit étrange ?, avril-juin 2009 (illustré en couleurs, p. 67).



Further Details

"Tout ce que Madame Jane Graverol veut peindre me paraît chargé de la résonance symbolique qui naît de la variété des sentiments romantiques et dramatiques. Au lieu de ‘s'évader par l'art’, il est en effet possible, à partir du moment où l'on décide de peindre, de ne pas abandonner ses préoccupations habituelles et de créer des images d'émotions contradictoires qui intéresseront réellement celui qui s'intéresse aux documents humains, qui pourra à son tour éveiller la curiosité d'un nouvel observateur et ainsi de suite, à l'infini. Les peintures de Jane Graverol se situent quelque part dans ce monde du sentiment où les liens entre les choses sont contenus dans des limites précises. Mais il s'avère que la force de l'inattendu rend plus difficile la saisie de leur sens. Jane Graverol ne veut pas contrer la puissance de l'inattendu, elle participe donc à la seule activité spirituelle nécessaire".
(René Magritte, Temps mêlés, 1953).

Artiste belge, Jane Graverol est l’une des figures féminines les plus importantes du mouvement surréaliste belge. Celle qui suivit les enseignements des symbolistes Constant Montald et Jean Delville à l’Académie des Beaux-Arts de Bruxelles et les préceptes de son père - peintre à l’autorité paternelle étouffante - ne manqua pas de se dégager rapidement des préceptes de ses maitres afin de prendre une place unique au sein du mouvement fondé en 1924 par André Breton. Son œuvre et la place qu’elle prit au sein de ce courant artistique majeur, confirme l’importance de la Belgique, véritable terreau fertile pour le courant surréaliste.
Inspirée du pionnier du Surréalisme, Giorgio De Chirico, mais aussi du maitre incontesté de ce mouvement, son compatriote René Magritte, Graverol commence à exposer sous le nom de Jean Graverol, ayant conscience des difficultés qui l’attendent en tant qu’artiste femme. Dès 1927, âgée d’à peine 22 ans, la jeune artiste se fait une place sur la scène artistique avec une exposition personnelle à la Galerie Fauconnier.
Celle qui avait pris l’habitude de poser pour son père et avait commencé sa carrière en réalisant des autoportraits, rejoint rapidement le groupe surréaliste dit ‘de Bruxelles’ suite à sa rencontre en 1949 avec René Magritte et Louis Scutenaire. Son impact immédiat et profond au sein du groupe est alors considérable : elle co-fonda avec André Blavier le groupe Temps Mêlés et co-éditant sa revue. En 1954, Graverol fonde ensuite la revue littéraire Les Lèvres nues avec Marcel Mariën, écrivain et poète surréaliste avec qui elle partagea une partie de sa vie.Cette revue mettait en avant une variété d’œuvres littéraires, poétiques et philosophiques dont le caractère provocateur et anticonformiste soutenait les idéaux et expressions artistiques du groupe. Admirée par ses deux co-auteurs, Graverol l’est également par René Magritte, développant tous deux un attachement profond pour le caractère poétique et énigmatique du langage surréaliste. Forts de ces échanges et de cette implication au sein du groupe, le style de Graverol évolue vers la production d’œuvres surréalistes d’une facture lisse comme Magritte, résultats de ce qu’elle appelle ses « rêves réveillés ».
Graverol, cependant, développa un style très personnel empreint d’une véritable sensibilité féminine et à l'opposé des représentations canoniques contemporaines des femmes (dans des rôles de mère nourricière ou de muse idéalisée). L’artiste substitue à l'image fondatrice de la femme nue, sur laquelle d'innombrables artistes masculins ont écrit leurs héritages, sa propre représentation empreinte de réflexions sur les propriétés propres des corps dans la représentation visuelle. Dans l’œuvre de Graverol, la femme devient érotisée, mais est surtout l’actrice de son propre destin. Le thème de l’émancipation féminine sous-tend dès lors bon nombre des œuvres de Jane Graverol, elle qui grandit dans une période historique de libération progressive du statut politique et économique des femmes.
Vers le milieu des années 1960, Jane Graverol prend ses distance par rapport au groupe surréaliste. Intéressée par la microbiologie et influencée par son enfance passée à côté du Muséum des Sciences naturelles de Bruxelles, l’artiste belge se plonge dans le monde de l’infiniment petit. A l’aspect surréaliste et aux idéaux d’émancipation féminine, s’ajoute désormais dans les toiles de l’artiste un intérêt fort et particulier pour le monde végétal et animal.
Les présentes Fleurs sont un exemple parfait de cette période de l’œuvre de Graverol et de son intérêt pour le thème récurrent de la nature morte. Ce sujet lui permet « d’établir le rôle majeur joué par les femmes artistes dans des traditions, souvent critiquées pour être ‘féminines’ et ‘décoratives’, et par conséquent moins importantes que le genre plus ‘masculin’ de la peinture d’histoire. » (P. Allmer, ‘Une « Pièce de dentelle » : production genrée et travail esthétique chez Rachel Baes, Jane Graverol et Irène Hamoir, in Histoire de ne pas rire, Le Surréalisme en Belgique, cat. exp., Bozar, Bruxelles, 2024,p. 215). La présente œuvre atteste de l’ancrage véritable de Graverol dans la nature, typique et constitutif du discours féminin surréaliste. Elle y associe l’émancipation de la femme et sa quête identitaire à l’émancipation de la faune et de la flore. La nature, comme la femme, dispose pour Graverol d’une force porteuse de toutes les transformations, d’une pulsion transformatrice. Cette œuvre est également typique du style lisse, inspiré par Magritte qui répond à une « exigence d’exactitude mimétique qui doit contribuer à piéger la conscience pour libérer l’imaginaire. Sensible, le pinceau de Graverol ne renonce pas à une qualité décorative qui allie éclat de la couleur et délicatesse de la touche. » (M. Draguet, ‘Du Surréalisme belge au féminin pluriel’, in Surréalisme au féminin ?, cat. exp. Musée de Montmartre, Paris, 2023, p. 34).
Ainsi, comme en témoignent ces Fleurs, la place de Jane Graverol au sein du mouvement surréaliste belge (et plus largement, international), fut d’une haute importance. Il y eu en Belgique, notamment grâce à elle, une véritable « intégration de la femme dans une dynamique créatrice voulue universelle dans sa pensée et universaliste dans sa composition » (Ibid., p. 33).

"Everything Madame Jane Graverol wants to paint seems to me charged with a symbolic resonance that arises from a variety of romantic and dramatic feelings. Instead of 'escaping through art', it is indeed possible, from the moment one decides to paint, not to abandon one's usual concerns and to create images of contradictory emotions that will genuinely interest those who are engaged with human documents, who can in turn awaken the curiosity of a new observer, and so on, infinitely. Jane Graverol's paintings exist somewhere in this world of feeling where the connections between things are contained within precise limits. However, it turns out that the force of the unexpected makes it more difficult to grasp their meaning. Jane Graverol does not want to counter the power of the unexpected; she thus participates in the only necessary spiritual activity. »
(René Magritte, Temps mêlés, 1953).

Belgian artist Jane Graverol is one of the most significant female figures in the Belgian Surrealist movement. Trained by Symbolist masters Constant Montald and Jean Delville at the Brussels Academy of Fine Arts and influenced by her father’s oppressive authority, she quickly freed herself from the principles of her masters to take a unique place within the movement founded in 1924 by André Breton. Her work and her role within this major artistic movement highlights Belgium's significance as a fertile ground for Surrealism.
Inspired by the pioneer of Surrealism, Giorgio De Chirico, as well as the undisputed master of this movement, her compatriot René Magritte, Graverol began exhibiting under the name Jean Graverol, aware of the challenges she faced as a female artist. As early as 1927, at barely 22 years old, the young artist made a place for herself on the artistic scene with a solo exhibition at the Fauconnier Gallery.
After posing for her father and beginning her career with self-portraits, she quickly joined the 'Brussels' Surrealist group after meeting René Magritte and Louis Scutenaire in 1949. Her immediate and profound impact within the group was considerable: she co-founded the group Temps Mêlés with André Blavier and co-edited its magazine. In 1954, Graverol then founded the literary magazine Les Lèvres nues with Marcel Mariën, a Surrealist writer and poet with whom she shared part of her life. This magazine showcased a variety of literary, poetic, and philosophical works whose provocative and nonconformist nature supported the ideals and artistic expressions of the group. Admired by her two co-authors, Graverol was also admired by René Magritte, both developing a deep attachment to the poetic and enigmatic nature of the Surrealist language. Strengthened by these exchanges and this involvement within the group, Graverol's style evolved towards the production of smooth Surrealist works like Magritte, the result of what she called her "awakened dreams. »
However, Graverol developed a highly personal style infused with a genuine feminine sensitivity, contrasting with contemporary canonical representations of women (as nurturing mothers or idealized muses). The artist substituted the founding image of the nude woman, on which countless male artists have built their legacies, with her own representation imbued with reflections on the inherent properties of bodies in visual representation. In Graverol's work, the woman becomes eroticized but is above all the actress of her own destiny. The theme of female emancipation thus underpins many of her works, as she grew up during a historical period of progressive liberation of women's political and economic status.
By the mid-1960s, Jane Graverol distanced herself from the Surrealist group. Interested in microbiology and influenced by her childhood spent near the Museum of Natural Sciences in Brussels, the Belgian artist delved into the world of the infinitely small. To the Surrealist aspect and the ideals of female emancipation, she now added a strong and particular interest in the plant and animal world in her paintings.
The present Flowers are a perfect example of this period in Graverol's work and her interest in the recurring theme of still life. This subject allows her "to establish the major role played by women artists in traditions often criticized for being 'feminine' and 'decorative,' and consequently less important than the more 'masculine' genre of history painting." (P. Allmer, 'Une « Pièce de dentelle » : production genrée et travail esthétique chez Rachel Baes, Jane Graverol et Irène Hamoir', in Histoire de ne pas rire, Le Surréalisme en Belgique, exh. cat., Bozar, Brussels, 2024, p. 215). This work attests to Graverol's true anchoring in nature, typical and constitutive of the feminine Surrealist discourse. She associates the emancipation of women and their quest for identity with the emancipation of flora and fauna. For Graverol, nature, like women, possesses a force capable of driving all transformations, a transformative impulse. This work is also typical of the smooth style, inspired by Magritte, that responds to a "demand for mimetic accuracy that must contribute to trapping the consciousness to liberate the imagination. Sensitive, Graverol's brush does not renounce a decorative quality that combines the brilliance of color and the delicacy of touch." (M. Draguet, 'Du Surréalisme belge au féminin pluriel', in Surréalisme au féminin?, exh. cat., Musée de Montmartre, Paris, 2023, p. 34).
Thus, as evidenced by Fleurs, Jane Graverol’s role within the Belgian (and broader international) Surrealist movement was of great importance. Thanks to her, there was a genuine “integration of women into a creative dynamic intended to be universal in thought and universalist in composition” (Ibid., p. 33).
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8 King Street, St. James's
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24.09.2024 – 24.09.2024
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