TOLSTOÏ, Léon (1828-1910)

Los 131
05.07.2023 13:00UTC +01:00
Classic
Verkauft
€ 11 340
AuctioneerCHRISTIE'S
VeranstaltungsortFrankreich, Paris
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ID 991120
Los 131 | TOLSTOÏ, Léon (1828-1910)
Schätzwert
€ 10 000 – 15 000
TOLSTOÏ, Léon (1828-1910)
Manuscrit autographe signé sur Zola et Dumas, en français [1893].
4 pages in-4 (297 x 204 mm) à l’encre noire sur papier, d’une écriture dense et serrée (pliée en quatre, usure au niveau des plis et très petit trou à la jonction des pliures)

Important manuscrit autographe d’un texte de Léon Tolstoï sur l’avenir de l’humanité et l’importance de la foi, en réponse à un discours d’Émile Zola et une lettre d’Alexandre Dumas. Le texte correspond aux sous-parties IV et V du chapitre "Zola et Dumas" publié en 1896 au sein de l'ouvrage Zola, Dumas, Maupassant.

En mai 1893, Emile Zola prononce un discours A la jeunesse à l’occasion du banquet de l’Association Générale des étudiants. Il se désole de l’émergence des « pasteurs d’âmes qui s’inquiètent et qui proposent ardemment une foi à la jeunesse » en mettant en garde contre « les dangers de l'illusion et du mysticisme. » Au contraire, Zola propose une autre foi à cette jeunesse qu’il exhorte en les « suppliant d’avoir la foi au travail ». Il martèle à ce propos : « Le travail ! messieurs, mais songez donc qu’il est l’unique loi du monde, le régulateur qui mène la matière organisée à sa fin inconnue ! La vie n’a pas d’autre sens, pas d’autre raison d’être ; nous n’apparaissons chacun que pour donner notre somme de labeur et disparaître. »

Alexandre Dumas fils réagit rapidement à ce discours au travers d’une lettre intitulée Le Mysticisme à l’Ecole publiée dans le journal le Gaulois : « Dernièrement Zola, dans un remarquable discours aux étudiants, leur a conseillé, comme remède et même comme panacée à toutes les difficultés de la vie, le travail. […] Le remède est connu ; il n’en reste pas moins bon, mais il n’est pas, il n’a jamais été, il ne sera jamais suffisant. »

Tolstoï est mis au fait de ces prises de position en juin 1893 et entreprend la rédaction d'un article au sujet du discours de Émile Zola, auquel il s’oppose, et de la lettre d’Alexandre Dumas fils.

Il écrit à son fils Lev à la fin du mois pour lui résumer la teneur de sa réflexion : « Je souligne la sottise du discours de Zola et la clairvoyance de Dumas, et j’exprime simplement mes idées aussi bien sur la science que sur ce que seulement l’assimilation de la vue chrétienne par les hommes sauvera l’humanité ».

Alors qu’il en a envoyé une traduction française à la Revue de famille pour publication, le texte est publié le 1er octobre 1893 par la Revue des revues dans une mauvaise traduction que Tolstoï trouve « détestable ». Il charge alors son traducteur habituel, Halpérine-Kaminsky, de faire publier un justificatif dans la presse française pour affirmer que cette traduction « défectueuse » a été faite à son insu et qu’il en refuse la responsabilité.

Tolstoï entreprend alors de corriger la traduction avec l’aide de Halpérine-Kaminsky afin que le texte, intitulé « Le non-agir », paraisse dans une version conforme à ses exigences en mars 1896 dans la revue Cosmopolis (pp. 761-774).

Tolstoï critique sévèrement la position de Zola en affirmant que le travail ne peut seul résoudre les problèmes d’ordre existentiel et moral et qu’il ne saurait apaiser la conscience. Il indique alors une marche à suivre tout à fait différente de celle de Zola : « au nom de Dieu arrêtez-vous pour un instant, cessez de travailler, regardez autour de vous, pensez à ce que vous êtes, ce que vous devriez être, pensez à l'idéal. »

L'autrice Angela Dioletta Siclar rapporte dans son article La science et la question sociale chez Tolstoï et Zola que « L'article de Tolstoï souleva un vif intérêt aussi bien dans le monde russe que dans le monde français. Mais l'auteur s'attira le ressentiment de Zola pour sa critique destructrice. Le 4 octobre 1893 Zola écrivait à Halpérine-Kaminsky, qui lui avait demandé un contredit à l'article de Tolstoï : « croyez-vous qu'il soit bien utile de répondre à Tolstoï ? Dans ce cas, envoyez-moi le texte complet. Je le lirai. Puis vous viendrez m'interviewer, car pour rien au monde je n'écrirais une ligne. Je ne veux que vous faire plaisir » (É. Zola, Correspondance, Les presses de l'Université de Montréal, Montréal 1991, t. VII, p. 62.) »

Finalement, la réflexion de Tolstoï sur les textes de Zola et de Dumas est reprise dans un volume de textes préparé par Halpérien-Kaminksy (Zola, Dumas et Maupassant, Léon Challaye, 1896). Ce dernier revient sur les circonstances d’écriture du Non-agir dans son avant-propos et complète le texte de Tolstoï avec ceux de Zola et Dumas, à l’origine la réflexion. Il ajoute : « l’article sur Zola et Dumas [le Non-agir] m’a été envoyé par Tolstoï expressément pour l’édition française, écrit en français avec de notables changements sur le texte russe paru précédemment. Je le donne tel quel ».

Le manuscrit présenté correspond ainsi au manuscrit autographe envoyé par Tolstoï à Halpérine-Kaminsky pour la publication de Zola, Dumas et Maupassant.

Important autograph manuscript from a text by Leo Tolstoy on the future of humanity and the importance of faith, in response to a speech by Emile Zola and a letter by Alexandre Dumas.


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